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Paper versus action & theory versus experience
Le présent document est le fruit de plusieurs cas difficiles dans mon métier de pilote, devant tout à la fois obéir aux règles et règlements, remplir tous les papiers en relation avec les codes ISM, ISPS, les normes ISO et autres, et en même temps effectuer le travail réel de pilotage en toute sécurité et en douceur. Dans le mode de navigation actuel, nombreux sont les papiers à remplir ainsi que les études et préparations à faire avant toute activité à bord. Depuis maintenant plus de 18 ans le code ISM est obligatoire. Et chaque jour de plus en plus de documents sont imposés pour guider les actions. Dans cet article, je vais couvrir ce moment spécifique où le navire approche du port, embarque le pilote et manœuvre vers son poste à quai. Même si cela peut être différent suivant le port, certaines caractéristiques peuvent néanmoins être généralisées.
Chaque manœuvre au port est précédée de préparatifs tant sur le navire qu'à terre. Chaque personne devant y participer doit pouvoir faire son travail correctement afin d'assurer la réussite de l'entreprise.
Que ce soit à l'arrivée ou au départ du port, un nombre de plus en plus impressionnant de check lists est à remplir. Chaque item se doit d'être vérifié consciencieusement, que cela concerne la barre, les radars, la VHF, l'ECDIS et ses corrections, toutes les publications nautiques utilisées, etc. Et il suffit d'oublier un seul item pour qu'un inspecteur PSC, pavillon, ISM (audit interne ou externe), société de classification, ou autre vetting fasse une remarque, enregistre une déficience ou une non-conformité. Il peut aussi mettre le navire en détention, ou à minima rendre la vie intenable à bord jusqu'à ce que des mesures de correction ou de prévention soient prises.
Comme pilote j'estime la « pilot card » correctement remplie à 30% seulement, des informations étant soit manquantes soit laissées du port précédent. Parfois même elle est présentée au pilote en fin de manœuvre de façon à être correctement remplie et surtout prête pour inspection.
Mais il y a aussi la préparation de la traversée par le pilote. Avec les moyens modernes de communication, il n'y a rien de plus simple pour le pilote de recevoir, largement à l'avance, les informations du navire, données fixes (longueur, etc.) ou variables (tirants d'eau, tirant d'air, déficiences, cargaison dangereuses, etc.). Reçu largement en avance, tout cela est essentiel pour la préparation de la traversée et la « pilot exchange form (MPAX) », nombre et disposition des remorqueurs, où les prendre, les zones d'évitage, les communications VTS ou avec le terminal, etc. Tout cela paraît simple et facile.
Qu'en est-il en réalité ? Très souvent les navires reçoivent des informations sur les ports au dernier moment et n'ont pas le temps nécessaire pour tous les préparatifs, ou comme c'est le cas des navires porte-conteneurs, les ports se succèdent dans un temps très court. L'équipage, 12 ou 13 membres, effectue alors des inspections, des contrôles, soit de façon officielle, soit en adoptant la méthode de la check list déjà remplie. Mais la plupart du temps, les inspections ne sont tout simplement pas faites. Excuses habituelles : le navire est neuf, en très bon état, la traversée n'a duré que quelques heures, pas assez de temps et pas de besoin de ré inspecter ce qui vient de l'être au port précédent, etc. Tout cela est logique, mais si un problème survient, cette excuse ne fonctionne pas avec les assurances, les enquêteurs, les administrations.
Du point de vue du pilote, il est habituel de servir un navire après un autre et de préparer le formulaire MPAX pendant le trajet d'un navire à l'autre. Tous les renseignements désirés peuvent se trouver sur le web et l'utilisation de tablettes et autres smartphones facilite ce travail, la planification de la traversée et la manœuvre à venir. Mais cela peut aussi être fait plus ou moins formellement sans y apporter toute l'attention nécessaire.
Que peut-il se produire si toute cette préparation n'est pas effectuée soigneusement et correctement ? Le capitaine du navire, dans de nombreux cas, n'est pas au fait des particularités du chenal, des limitations éventuelles de vitesse, des détails du poste d'amarrage, des habitudes des remorqueurs. De l'autre côté, le pilote n'a pas une vraie connaissance des caractéristiques du navire ni de son état au moment de la manœuvre. Si tout se passe bien, aucun problème. Mais dans le cas contraire, si quelque chose se passe mal, alors il faudra répondre aux questions. Dans la plupart des cas, les choses pourraient être faites correctement, sacrifiant un peu de sommeil ou de repos. Toutefois, il faudrait donner la priorité à ce qui est le plus important, le travail administratif en vue d'inspection ou effectuer le travail.
Regardons l'entrée dans le port de Varna. Le pilote embarque à l'est du méridien du Cap Galata. Normalement le navire approche à la vitesse minimale de 6 nœuds. La distance entre la zone d'embarquement du pilote et la prise des remorqueurs afin d'entrer dans des eaux resserrées est inférieure à 1,5 mille, et le temps d'échange d'informations n'est que de quelques minutes. Pour le pilote, dans de telles circonstances, il est plus important de communiquer avec les remorqueurs, de préparer les remorques, de donner des ordres de barre et de machine pour garder une position correcte que de remplir des documents. Dans ce cas la signature de la « pilot card » ou d'autres documents, en particulier à bord des pétroliers et autres navires sophistiqués, n'est pas une bonne pratique car cela pourrait faire perdre conscience de la situation, détourner l'attention à un moment crucial de la manœuvre. La même chose est valable pour le capitaine au sujet des documents du pilote. Mais si un incident se produit, alors tout le monde va commencer à demander pourquoi tel ou tel document n'a pas été rempli ou signé.
D'une manière générale, les actions sont plus importantes que les documents. Les papiers ne devraient être faits que lorsqu'on a de la disponibilité.
Aucune personne ne devrait être blâmée si elle a effectué des actions au lieu de remplir et signer les papiers.
Dimitar Dimitrov
Pilot in the port of Varna (Bulgaria)
Master Ocean Going Ships, PHD, MNI,
Chairman Bulgarian Shipmasters Association
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