Lors de l'inauguration très médiatisée le 6 octobre 2015 au Havre du « CMA CGM BOUGAIVILLE », qualifié pour être un des plus gros porte-conteneurs sous pavillon français, mais de fait sous Registre International Français (RIF), le Président de la République avait déclaré à cette occasion : « C'est un grand jour pour Le Havre, mais aussi pour la France, qui peut être aussi la première au monde ».
Mais la réalité est tout autre : le nombre de navires sous pavillon français connaît un déclin continu. Détenteur de la 5e place mondiale dans les années 1960, il occupe désormais la 28e place et représente 0,5% du tonnage mondial. Au 1er juillet 2015, la flotte de transport sous pavillon français ne compte plus que 176 navires, contre 212 il y a seulement dix ans. Elle est menacée de disparition, d'une part en raison de sérieux problèmes de compétitivité, dans un domaine particulièrement soumis à la concurrence internationale, et aussi sous l'effet de réglementations nationales trop contraignantes ou de manque d'aide à l'investissement.
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L'évolution spectaculaire du transport maritime mondial
Le transport maritime mondial n'a cessé d'augmenter année après année pour répondre à l'accroissement des échanges provoqué par les progrès de la mondialisation de l'économie, dont la croissance est évaluée autour de 3,3% depuis 2012.
En 2014, 10,25 milliards de tonnes de marchandises ont été acheminées par voie maritime, alors qu'il y a 20 ans le tonnage transporté par mer s'élevait seulement à 4,6 milliards de tonnes.
Ce tonnage comprend 4,5 milliards de tonnes de vracs solides (minerais, charbon, céréales…), 3,1 milliards de tonnes de vracs liquides (pétrole brut, raffinés, gaz), 1,6 milliard de tonnes de conteneurs et 1 milliard de tonnes d'autres frets, essentiellement du général cargo.
Pour transporter ces marchandises, la
flotte mondiale de
50 442 navires de commerce pour un port en lourd estimé à 1,66 milliard de tonnes. Les vraquiers ont bénéficié ces dix dernières années d'une progression considérable correspondant à plus de la moitié de l'augmentation du tonnage mondial, et les porte-conteneurs ont plus que doublé leur tonnage. Le secteur pétrolier a connu une évolution plus modeste, alors que les cargos conventionnels et les vraquiers de tonnage moyen sont en retrait de près de 20% sur dix ans.
Pour autant, le ralentissement du développement chinois et la chute des prix du pétrole perturbent toutes les prévisions et concourent à une surabondance de navires et à une baisse des taux de charte.
La flotte mondiale est aujourd'hui dominée par les
pavillons de libre immatriculation, au total 152, dont certains sont qualifiés de « complaisance ». Classés par
Etats du pavillon, le Panama occupe le premier rang avec 343 millions de tpl et 6 745 navires, le Liberia le second rang avec 198,8 millions de tpl et 2 996 navires, et les Iles Marshall le troisième rang avec 168,6 millions de tonnes et 2 345 navires (+15,7% par rapport à 2014). Ils concentrent à eux trois 42,8% du port en lourd mondial.
Ils sont suivis par Hong Kong, Singapour, Malte, la Grèce, la Chine, les Bahamas, et le Royaume-Uni pour ne nommer que les dix premiers. La France, doublée par la Belgique, les Philippines et le Vietnam, passe du 27e au 28e rang mondial.
Plus des trois quarts du tonnage de la flotte mondiale navigue sous des
pavillons différents de ceux qui correspondent à la nationalité des armateurs. Seulement quatre pays contrôlent plus de la moitié du tonnage mondial, la Grèce, le Japon, la Chine et l'Allemagne. Ils totalisent à eux quatre 864 millions de tpl, soit 52% du port en lourd mondial. Les
Grecs sont de loin les principaux maîtres du transport maritime, avec le contrôle de quelque 308 millions de tonnes.
La plupart des principaux pays de contrôle réel de la flotte de commerce exploitent un tonnage beaucoup plus important sous
pavillon étranger que sous leurs propres couleurs. La palme de la fuite devant le pavillon national revient en premier lieu au Japon (93%), suivi des Etats-Unis (92%) et de l'Allemagne (90%). Les Grecs et les Norvégiens se situent respectivement à 76% et 75%, la France à 72%.
La flotte de commerce mondiale est sous le contrôle d'une vingtaine de groupes de transport maritime, qui cumulent 589 millions de tpl et représentent 35% du port en lourd mondial. Les quatre plus importants sont des armements japonais et chinois. Ils sont suivis par A.P. Moller-Maersk (Danemark), Oldendorff carriers (Allemagne), Mediterranean Shipping (Suisse) et CMA CGM (France).
Le transport maritime français
Au 1er juillet 2015 la flotte de commerce sous pavillon français compte 301 navires, se décomposant en une flotte de transport de 176 navires d'une capacité d'emport de plus de 6,3 millions de tpl, et une flotte de services maritimes de 125 navires. Au-delà de ces chiffres, la flotte contrôlée par des intérêts français sous d'autres pavillons comprend 796 navires dont 62% de navires de charge et 38% de navires de services maritimes offshore ou spécialisés.
Les principaux pavillons tiers qui accueillent des navires opérés par des sociétés françaises sont par ordre décroissant de tonnage : Libéria (20%), Malte (17%), Royaume-Uni (16%), Singapour (7%), Bahamas (6%), Iles Marshall (5%) et Chypre (4%). Le reste du tonnage est réparti sur 44 autres pavillons.
Répartie selon les registres d'immatriculation, la flotte française de transport comprend 73 navires inscrits au Registre International Français (RIF), 63 navires au registre métropolitain et 40 navires aux registres d'Outre-mer, dont 27 en Polynésie française. La flotte de services maritimes comprend 94 navires inscrits au RIF et 31 navires au registre métropolitain.
L'âge moyen de la flotte de transport française est de huit ans, alors que celui de la flotte mondiale est évalué à 16,3 ans.
Les vracs secs
Le transport maritime mondial de vracs secs, estimé à 760 millions de tonnes en 2015, représente 43,5 % du tonnage mondial. Il dépend en grande partie de l'extraordinaire demande chinoise, que ce soit en charbon ou en minerai de fer. Néanmoins, l'année 2015 sera marquée par un ralentissement lié aux injonctions du gouvernement chinois concernant les importations de charbon de mauvaise qualité, donc polluant. Le trafic maritime mondial de fer est destiné à plus des trois quarts à la Chine. Les principaux pays exportateurs sont l'Australie et le Brésil.
Les grains restent une des bases structurelles de l'économie du transport des vracs, d'autant plus que les productions céréalières affichent des records d'année en année.
La
flotte mondiale des vraquiers est évaluée à 10 793 navires, dont 1 644 capesize (100 000 t et plus), 2 913 panamax (de 60 000 t à 100 000 t), 3 220 handymax (40 000 à 60 000 t), 2 363 handysize (10 000 à 40 000 t), et 653 minibulk, soit une croissance de 4,4% en 2015.
Les taux d'affrètement des capesize ont cependant chuté de manière significative en 2014, un peu moins cependant pour les panamax et pour les handymax. La cause est connue et relativement ancienne : la surcapacité.
L'année 2016 sera vraisemblablement marquée par un nombre sans précédent de faillites dans les armements maritimes au vrac sec. L'indice Baltic dry qui compile les taux de fret maritimes sur le charbon, les céréales et le minerai de fer s'est effondré à 325 points au début de cette année.
Le marché mondial des vracs secs est sous le contrôle de cinq grands groupes asiatiques (NYK, Mitsui OSK, China Cosco, K Line et China Shipping Bulk), un armement allemand (Oldendorff Carriers) et un armement suisse (SwissMarine). Des groupes miniers se sont faits armateurs pour mieux contrôler leur logistique. C'est le cas du brésilien « Vale » qui a mis en service 34 minéraliers de 400 000 tpl.
Le secteur des vracs secs en France
Dans ce secteur très concurrentiel, la France ne compte plus de navire sous registre français. Et pourtant, la France est le premier exportateur européen de blé, le cinquième au monde.
La
flotte de transporteurs de vracs secs, contrôlée en propriété par les armateurs français, s'élève à 37 navires, tous sous pavillon étranger (Panama, Malte, Singapour, Indonésie).
C'est la seule catégorie en forte augmentation : huit navires supplémentaires depuis l'an dernier. Quinze de ces navires appartiennent au groupe Louis-Dreyfus, dont cinq (quatre capesize et un handymax) à Louis-Dreyfus Armateurs (LDA), quatre handymax à LDA Rouiller, filiale de LDA et du groupe malouin Roullier, trois handymax à LDAP, associant LDA, la société FFP (groupe familial Peugeot) et une banque suisse, et trois barges autopropulsées appartenant à Sinarmas LDA, filiale du groupe indonésien Sinar Mas et de LDA.
Le groupe Greenship Bulk, filiale singapourienne de transport de vracs de Jaccar (Jacques de Chateauvieux), possède une série de 20 supramax et deux handymax. Cette flotte, dont l'armement est confié au groupe V.Ships, est opérée par la société française Setaf Saget, filiale de Greenship.
EDF Trading, filiale d'EDF basée à Londres, possède deux capesize sous pavillon panaméen détenus en copropriété avec des groupes japonais.
Parmi les huit navires cimentiers sous le contrôle d'intérêts français, un seul navigue sous pavillon français : le Capo Nero, affecté à la ligne Nice/la Corse pour le compte du groupe Lafarge. Ce dernier, associé à un groupe suisse affrète sous pavillon du Luxembourg l'Endeavour, appartenant au groupe Bourbon, et contrôle une flotte en propriété, principalement en Amérique du Nord.
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Le transport pétrolier et de gaz
Le monde du pétrole évolue dans un environnement pour le moins agité, lié à l'arrivée rapide d'une nouvelle production américaine ou à l'effondrement des prix, à l'initiative de l'Arabie Saoudite.
Depuis 2009, les flux maritimes de pétrole tournent autour de 1,8 milliard de tonnes, sans véritable croissance. La demande croissante des pays émergents, tels que la Chine et l'Inde, est contrecarrée par la baisse de la demande européenne et japonaise, touchée par une moindre consommation.
Les tarifs des tankers ont accusé le coup, souffrant d'un trop grand nombre de navires par rapport à la demande. Les indices Baltic Dirty Tanker Index (BDTI) et Baltic Clean Tanker Index (BCDI) ont accusé leur plus faible niveau depuis la fin de 2015.
- La flotte mondiale des tankers compte 13 616 unités, dont 12 136 pétroliers et 1 480 chimiquiers. La flotte des pétroliers transportant du brut ou du raffiné comprend 656 VLCC (200 000 t et plus) – 498 Suez max (120 000 à 200 000 t) – 922 Aframax (80 000 à 120 000 t) – 434 Panamax (53 000 à 80 000 t) – 1490 Medium Range product (40 000 à 53 000 t) – 5009 Handy product (25 000 à 40 000 t) et 3127 Small product (3 000 à 25 000 t).
- Parmi les dix premiers armements de transport de pétrole brut, la National Iranian Tanker Company conserve le premier rang avec 51 navires, dont 12 VLCC de 318 000 t, pour 13 433 000 tonnes de port en lourd. Le second armement Teekay Corporation (Bermudes/Canada) poursuit sa progression avec 96 navires pour 13 144 000 tpl. Euronav occupe la troisième place, avec 51 navires pour 12 384 000 tpl. Suivent des armements chinois, japonais, singapouriens, grecs, saoudiens ou norvégiens.
- L'armement Scorpio Tankers, dont le siège est à Monaco, confirme son titre de premier transporteur de produits pétroliers raffinés, avec une flotte de 93 navires pour 5 777 000 tonnes de port en lourd. Suivent, pour les plus importants, deux armements danois dont Maersk Tankers, des armements singapouriens, japonais, chinois.
- Le transport maritime de produits chimiques s'opère à bord de navires citernes à cuves spéciales, desservies par des tuyauteries indépendantes de façon à ne pas mettre en contact les produits. Les deux armements les plus importants sont Stolt-Nielsen, dont le siège se trouve aux Bermudes, et qui dispose d'une flotte de 110 navires, d'un port lourd évalué à 2 392 000 t, et le norvégien Odfjell dont la flotte de 75 navires, d'un port en lourd équivalent, comprend l'un des deux plus grands chimiquiers du monde, le Bow Pioneer pouvant charger jusqu'à 86 000 m3 de produits dans 31 citernes.
- Le transport maritime de gaz naturel liquéfié (GNL) couvre aujourd'hui 10% de la consommation mondiale de gaz naturel. Les échanges internationaux de GNL ont été évalués en 2014 à 301,39 milliards de m3. Le Qatar reste le premier exportateur de GNL avec 32% des exportations mondiales.
La flotte mondiale des méthaniers a été évaluée au 10 septembre 2015 à 389 navires d'une capacité totale de 60 millions de m3. A cette date 133 méthaniers d'une capacité de plus de 20 millions de m3, étaient en commande
- Qatar Gas Transport Company est le numéro un mondial, avec une flotte de 54 navires d'un port en lourd de 8 305 000 t, dont notamment 14 Q-Max de 263 000 tpl. Parmi les autres grands armateurs de méthaniers, figurent des Japonais, des Grecs, des Malaisiens, des Nigériens et des Norvégiens.
A noter que le système des membranes développé par les sociétés françaises Gaz Transport et Technigaz (GTT) équipe 70% des méthaniers en service aujourd'hui, et 80% des navires en commande.
Depuis les années 2000 et la mise en place de nouvelles zones d'émission spéciale visant à réduire les émissions par les navires de dioxydes de soufre (SOx) et d'oxydes d'azote (NOx), le panel des navires utilisant du GNL comme carburant a tendance à s'étendre, d'abord aux navires gaziers puis aux ferries, aux navires de soutien offshore, aux remorqueurs portuaires et maintenant à quatre navires à passagers commandés par Costa.
La flotte pétrolière française
En France,
la flotte pétrolière et gazière compte
41 navires d'une capacité d'emport de près de 4,0 millions de tpl, dont 35 pétroliers et 6 transporteurs de gaz liquéfié. L'âge moyen de la flotte s'établit à 6,4 ans contre 15,1 pour l'ensemble de la flotte mondiale.
- La flotte de transports de pétrole brut sous pavillon français (RIF) est composée de 11 navires (10 VLCC et un Suez max) de propriété étrangère loués coque nue, en majorité affrétés, et gérés par Euronav pour six d'entre eux, et par V.Ships France pour les cinq autres.
- La flotte de transports de produits raffinés compte 38 navires dont 24 sous pavillon français (RIF) et 14 sous pavillon étranger. Le départ en 2014 des sept navires de Maersk Tankers France (dont cinq sous pavillon français), et la vente de neuf navires ces derniers mois ont contribué à une diminution de 20% de la flotte.
- Parmi ceux-ci, l'armement Socatra gère 12 navires dont 7 sous pavillon RIF – Sea-Tankers, 19 navires dont 10 sous pavillon RIF – CFT (Maritima), 4 navires dont 3 sous pavillon métropolitain, un sous pavillon RIF – CFT (Biomar), 2 sous pavillon métropolitain et Sermap, 1 sous pavillon RIF.
- Le secteur gazier continue de bénéficier de tendances favorables avec l'intérêt soutenu pour le GNL et surtout pour le GPL. La flotte de méthaniers (GNL) sous registre RIF comprend trois navires gérés par l'armement Gaz Océan. Le groupe Engie (ex-GDF Suez) affrète une dizaine de méthaniers, tous sous pavillon étranger, et « Total » trois méthaniers, aussi sous pavillon étranger.
- La flotte des 26 navires de transports de gaz de pétrole liquéfiés (GPL) sous contrôle français ne comprend plus que trois unités sous pavillon tricolore. Ces trois navires d'un volume de 78 716 m3 pour l'un d'entre eux et de 35 566 m3 pour les deux autres, sont gérés par l'armement Geogas maritime.
Le transport conteneurisé
Après le temps du ralentissement de la vitesse (slow steaming), puis celui des alliances, les armateurs ont rivalisé à commander de très grands navires, de plus de 18 000 EVP. Cette taille était apparue en 2011 avec les 20
Triple E de Maersk, suivie en 2015 avec la série
MSC Oscar (19 200 EVP). La course au gigantisme s'est poursuivie en 2015 avec la commande d'une quarantaine de très grands porte-conteneurs dont les plus grands du monde pourront transporter 20 600 EVP.
- Selon Alphaliner, la capacité mondiale de transport par navires porte-conteneurs intégraux (dits cellularisés) atteint au 31 décembre 2015 près de 20 millions d'EVP (19,36 M) à bord de 5 153 navires, soit 10 millions de plus qu'en 2006. En un an, l'augmentation nette (livraison moins démolition) de la flotte est évaluée à 8,5%, correspondant à 1,72 M EVP de plus.
Au 1er janvier 2016, 499 porte-conteneurs étaient en commande dans le monde entier, en presque totalité dans les chantiers de quatre pays (Chine, Corée du Sud, Philippines et Japon). Toutefois le consultant britannique Drewy a fait part de ses sombres perspectives 2016 dans le transport maritime de conteneurs. L'écart croissant entre l'offre de transport et la demande conduiront à une baisse des taux de fret et à une hausse des pertes des transporteurs en 2016.
Le principal marché du conteneur est-ouest reste l'Asie vers l'Europe (15,4 M EVP en 2014), devant l'Asie-Amérique du Nord (14,7 M EVP). Par contre les marchés dans l'autre sens sont beaucoup moins importants (7 M EVP entre Europe-Asie et 7,5 M EVP de l'Amérique du Nord vers l'Asie), témoignant de la toute puissance exportatrice chinoise. Le marché transatlantique, plus modeste, est plus équilibré (3,9 M EVP depuis l'Europe et 2,7 M EVP vers l'Europe).
- Les vingt premiers armateurs dans le transport conteneurisé cumulent une capacité de 17,2 millions d'EVP, soit une part de marché de 87%. L'Europe est en première position, suivie de l'Asie.
L'armement AP Moller-Maersk détient le premier rang avec 598 navires pour une capacité de plus de 3 millions d'EVP, et 35 navires en commande, soit 14,7% du marché. Il est suivi par MSC, 500 navires pour 2 600 000 EVP, soit 13,1% du marché : l'armement détient le carnet de commandes le plus impressionnant (50 navires pour 660 000 EVP, dont 16 unités de 19 000 EVP). Suivent CMA CGM, 466 navires pour 1 820 000 EVP(1) – Evergreen, 200 navires pour 950 000 EVP – Hapag-Lloyd, 173 navires pour 920 000 EVP, Cosco Container Lines, China Shipping Container Lines, Hamburg Sud, Hanjin Shipping Company, Orient Overseas Container Line, pour les dix premiers.
La situation des armements français
La
flotte de porte-conteneurs intégraux française détenue par CMA CGM s'élève à 86 unités en propriété dont 21 sont sous pavillon RIF, et 65 sous pavillon étranger, Royaume-Uni pour la plus grande partie, Bahamas, Malte, Madère, Hong Kong, Taïwan et Maroc pour les autres. La flotte d'affrétés par CMA CGM, évaluée à 380 unités, s'est enrichie en 2015 de dix porte-conteneurs de China International Marine Containers.
L'armement
Marfret compte trois porte-conteneurs sous pavillon RIF.
CMA CGM a engagé depuis des années une politique d'optimisation des coûts (augmentation de la taille des navires, réduction de leur vitesse) pour développer des stratégies de conquête de nouveaux marchés (trafics Nord-Sud) et la recherche d'alliances.
Le carnet de commandes de CMA CGM s'élève à 33 unités, dont 14 prévus en propriété (dont trois 20 600 EVP) et 19 affrétés. Parmi les navires livrés fin 2015 figure le
CMA CGM Bougainville, le plus grand porte-conteneurs battant pavillon RIF (voir supra).
Les services maritimes
La flotte de services maritimes sous pavillon français s'élève à 125 unités.
- les navires spécialisés regroupent 22 navires, soit 10 câbliers, 6 navires de travaux maritimes, et 6 navires sismiques. Le groupe de recherche sismique CGG propriétaire de 11 navires, armés par Geofield.D, joint-venture entre CGG et Louis-Dreyfus Armateurs (LDA), a décidé en novembre 2015 de se séparer des 6 navires sous pavillon français. Cette décision est dramatique pour les 82 officiers français employés sur ces navires.
- les navires offshore comptent 67 navires, 18 supply vessels, 18 AHTS, 8 ravitailleurs, 8 navires d'assistance, 10 transport de personnel et 5 divers. La quasi-totalité de ces navires est armée par le groupe Bourbon.
- les autres services maritimes, 2 dragues, 28 remorqueurs en cabotage international et 6 navires de recherche océanographique, comptent 36 navires. Les remorqueurs sont armés par la plupart par Boluda, d'autres par les Abeilles et Bourbon.
La baisse du prix du pétrole pèse sur la prospection offshore ; elle pourrait impacter particulièrement la recherche sismique (voir supra) et freiner l'investissement dans l'exploitation offshore.
Le transport de passagers
La flotte française de navires à passagers représente 51 navires dont 7 navires de croisière et 44 ferries.
Les ferries
Nous n'évoquerons pas les difficultés qu'ont connues
MyFerryLink(
2) et que connaît la
SNCM(
3) , et analyserons la situation de la flotte des transbordeurs telle qu'elle était au 1er juillet 2015.
La
flotte des ferries comprend 44 unités dont 39 transbordeurs, 2 navires à grande vitesse et 3 rouliers mixtes. Parmi ceux-ci, 27 sont sous registre français et 17 sous pavillon étranger.
Basés pour 26 d'entre eux en Méditerranée, et 19 en Manche-Atlantique, ces navires se partagent deux importants marchés, celui de la desserte maritime de la Corse et celui de la desserte transmanche.
Les principales compagnies françaises qui opéraient sur ces secteurs avec des navires au 1er registre métropolitain, la
SNCM sur la Corse, naguère
SeaFrance puis
MyFerryLink sur la desserte transmanche ont traversé et traversent encore une période de bouleversement économique avec pour conséquence un lourd impact sur l'emploi national de marins.
La desserte maritime de la Corse
La desserte de la Corse est assurée pour le moment par 5 compagnies :
Corsica Ferries, 11 transbordeurs et un NGV, tous sous pavillon italien – la
SNCM, 7 transbordeurs, tous sous pavillon français – la
Méridionale, 4 transbordeurs dont 3 sous pavillon français et un sous pavillon chypriote –
Baja Ferries, 2 transbordeurs sous pavillon respectivement mexicain et panaméen, et un roulier mixte sous pavillon mexicain.
Les navires de
Corsica Ferries, qui détient près de 70% du trafic passagers France/Corse, desservent au départ de Toulon et de Nice les ports de Bastia, Ajaccio, Calvi et l'Ile Rousse. La
SNCM, dont les parts de marché ont régressé de manière significative, dessert au départ de Marseille les ports de Bastia, Ajaccio, Propriano, Porto-Vecchio et l'Ile Rousse.
Les navires de la
SNCM et de la
Méridionale ont longtemps bénéficié du dispositif de la continuité territoriale reposant sur une délégation de service public. Ce dispositif est actuellement remis en question, en particulier par la Collectivité Territoriale Corse (CTC), favorable à la création d'une compagnie maritime corse.
Les liaisons transmanche
Le marché transmanche est dominé par deux grandes sociétés, le groupe
Eurotunnel et l'armement britannique
P&O Ferries, qui ont affiché des trafics record en 2015. Du côté français, la disparition de
SeaFrance suivie par celle de
MyFerryLink, et la fusion de LD Lines avec DFDS Seaway, ont profondément modifié le marché.
Le trafic maritime transmanche entre la France et l'Angleterre est réalisé au départ de la France par les ports de Dunkerque, Calais, Dieppe, Cherbourg, Caen-Ouistreham, Saint-Malo, Roscoff, et au départ de l'Angleterre par les ports de Douvres, Newhaven, Portsmouth, Weymouth et Plymouth.
Sur un axe Europe continentale-Royaume Uni, la liaison maritime Calais-Douvres constitue le point de passage le plus court et le plus rapide, aussi est-elle considérée comme une route stratégique.
L'année 2015 a vu rebondir l'activité fret sur la Manche et la mer du Nord et un retour marqué de la clientèle britannique. La baisse des cours du pétrole a plus particulièrement favorisé un secteur qui fait face à une concurrence de plus en plus féroce tout en devant adapter ses navires aux normes environnementales dans les zones contrôlées d'émissions atmosphériques.
Deux armements français assurent actuellement les liaisons transmanche :
- DFDS Seaway France exploite 4 transbordeurs sous pavillon français, dont 2 sur la ligne Calais-Douvres et 2 sur la ligne Dieppe-Newhaven, pour laquelle elle bénéficie d'une DSP ;
- Brittany Ferries (2 500 salariés, 2 millions de passagers), 9 transbordeurs et un NGV sous pavillon français. La compagnie dessert une douzaine de lignes régulières au départ de la France vers l'Angleterre, l'Irlande et l'Espagne, et au départ de l'Angleterre vers l'Espagne.
Le groupe
Eurotunnel, propriétaire des trois navires de la
SCOP SeaFrance, exploités par
MyferryLink avant sa liquidation, a décidé en juin 2015 de louer deux d'entre eux, le Berlioz et le Rodin à DFDS. Cette décision pose le problème de l'avenir des salariés de la SCOP SeaFrance, DFDS en reprenant 200. Pour autant, Eurotunnel gardera le roulier mixte
Nord Pas-de-Calais, qui sera exploité en fréteur, ce qui permettrait de sauvegarder l'emploi de 100 à 130 salariés.
Les paquebots de croisière
Malgré les incertitudes économiques et la montée du terrorisme qui limite les zones d'exploitation, l'industrie de la croisière continue de se développer à un rythme frénétique. Le nombre de navires va atteindre le cap des 300 unités, dont la capacité a augmenté d'environ 25% ces dix dernières années. Le nombre total de croisiéristes s'est élevé en 2014 à 22,1 millions, dont 11 millions pour les Etats-Unis.
En France, le marché de la croisière a atteint en 2014 près de 600 000 passagers (+14% par rapport à 2013), ce qui confirme son rang de 9e au niveau mondial, et de 4e au niveau européen.
Trois leaders dominent le marché français,
Costa, MSC et
Croisières de France qui totalisent 86% du marché.
La flotte française de croisière compte 6 navires : le paquebot à voiles
Club Med 2 et les 6 paquebots de haute gamme du
Ponant, tous sous pavillon Wallis et Futuna.
Conclusion
Il est navrant de constater que le pavillon français joue actuellement sa survie, connaissant depuis 2008 une succession continue de dépavillonnements. Désormais la flotte de transport compte nettement moins de 200 navires, puisque l'on atteint 176 navires, seuil considéré longtemps comme impossible à franchir. Et pourtant, notre marine marchande dispose d'une flotte moderne et de qualité, figurant en tête des classements de l'International Chamber of Shipping (ICS) et du Memorandum de Paris.
Et les discours prononcés en novembre dernier à Marseille lors des Assises de la mer ne sont pas pour nous rassurer. Aucune mesure pour assurer la compétitivité du pavillon français et des entreprises françaises de transport n'a été énoncée par le secrétaire d'Etat.
De même, la réforme de la loi de 1994 portant l'extension de l'obligation de pavillon français pour les produits raffinés avait été annoncée, comme une mesure phare, lors des Assises de la mer de Nantes en décembre 2014. Le décret d'application vient seulement d'être signé le 2 février de cette année, le texte devant s'appliquer au 1er juillet. Hélas, armateurs et syndicats de navigants estiment qu'il n'offre aucune garantie en termes d'extension de la flotte et d'emplois.
Nouvelle plus rassurante, dans un contexte morose pour la flotte de commerce française, disparition de MyFerryLink, plan social à l'ex-SNCM, désarmement des navires sismiques de CGG…, la proposition de loi pour l'économie bleue, portée par le député Arnaud Leroy a été adoptée le mercredi 3 février.
Malgré les réticences du gouvernement, les députés ont voté, entre autres, l'exonération totale des charges patronales pour les armateurs de navires de commerce battant pavillon français soumis à la concurrence internationale. Pour les armateurs, « cette mesure est une victoire pour la compétitivité des entreprises de transport et de services maritimes, leur permettant de rester compétitifs face à leurs concurrents européens ».
Aussi ne pouvons-nous que souscrire au souhait des armateurs français qui serait « d'adopter une vision claire de la marine marchande à cinq ou dix ans » car, « si l'on ne se donne pas les moyens de cette réflexion et si on ne développe pas les outils nécessaires, la marine marchande ne trouvera pas le chemin de la
croissance bleue, ni en nombre de navires, ni en nombre d'emplois ».
René TYL,
Membre de l'AFCAN
1 |
CMA CGM a annoncé à la fin de l’année 2015 l’achat de l’armateur singapourien Neptune Orient Lines (NOL), et se retrouvera à la tête d’une flotte de 563 navires contre 466 jusqu’alors, avec une capacité de 2,3 M EVP, talonnant MSC. |
2 |
Société commerciale exploitant les navires d’Eurotunnel avec le personnel d’une société coopérative (SCOP). Depuis le 1er janvier 2015 la SCOP SeaFrance a été placée en liquidation judiciaire. |
3 |
Placée en redressement judiciaire depuis fin novembre 2014. |
Sources
La flotte de commerce sous pavillon français au 1er juillet 2015 (Mission de la flotte de commerce)
Journal « Le Marin »
L'atlas économique de la mer 2016
Projet de loi de finances pour 2016 : transports maritimes (le Sénat)
Review of maritime transport 2015 (UNCTAD)
Transport maritime (BRS group)
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