Retour au menu
Retour au menu

Résumé de la vie de William BLIGH,
un capitaine évincé de son navire à plusieurs reprises



       Pour avoir récemment fait un tour au Nautical Institute à LONDRES, je me suis arrêté quelques minutes pour rendre une petite visite à un illustre collègue, le Commandant William BLIGH. En effet notre collègue, qui a été rendu célèbre par la mutinerie du BOUNTY, repose tout près du siège de l'OMI à quelques pas de LAMBETH BRIDGE.

       L'histoire du BOUNTY pouvait bien sûr donner lieu à des films intéressants notamment le dernier qui date de 1984 et où BLIGH était joué par Anthony HOPKINS. Mais on a bien romancé tout cela et lorsqu'on regarde de près la vie de notre collègue, elle a été tout aussi intéressante avant et après la mutinerie du BOUNTY.

       Embarqué de bonne heure (âgé de 8 ans ! - comme Ship's boy ou Captain's servant), comme cela se faisait en ce temps là, William BLIGH, né en CORNOUAILLES en 1754 dans un petit village qui porte le nom d'un grand saint bien connu en BRETAGNE (St TUDY) semble avoir gravi tous les échelons jusqu'au grade de Vice-Amiral of the Blue, sans être vraiment passé par l'École Navale. Cela ne l'a pas empêché d'être un excellent marin, un botaniste, un cartographe, un ingénieur portuaire et surtout un excellent Capitaine… peut-être un peu rigide, mais certainement pas le salaud qu'on nous a trop fréquemment décrit.

       Il y a peu, le 24 Mars 1989, ironie de l'histoire, un gros pétrolier que tout le monde connaît, l'EXXON VALDEZ, dans le PRINCE WILLIAM SOUND, monte sur un caillou qui a pour nom Bligh Reef ! En effet, découvert en 1778 durant son troisième voyage à la recherche du passage du Nord Ouest, James COOK lui donna le nom d'un officier d'un des navires de l'expédition. Cet officier de 24 ans seulement n'était autre que William BLIGH sur le HMS RESOLUTION.

       Bligh a fait la plus grande partie de sa carrière dans la NAVY mais restait quand même dans la réserve (Blue Ensign) … il navigua au commerce entre 1783 et 1789 comme Lieutenant et Capitaine. D'ailleurs, recommandé par la ROYAL SOCIETY, une fondation scientifique très British, il rejoint la « Navy » pour prendre le commandement de la BOUNTY, à l'âge de 33 ans. Il s'agissait pour son armateur Écossais de ramener du pacifique vers les Antilles et notamment la Jamaique et la Barbade, des plants d'arbre à pain afin de nourrir facilement les esclaves noirs ramenés d'Afrique ou d'ailleurs.

       Si le fond de l'histoire de la mutinerie de la BOUNTY est connu, on sait bien que c'est surtout le « confort » des îles et spécialement de TAHITI qui fut à la source de la mutinerie. Une partie de l'équipage se voyait mal repartir vers l'hémisphère Nord en passant par le terrible Cap Horn qu'ils n'avaient pu franchir au voyage aller !

       En effet les Polynésiens, et surtout les Polynésiennes, étaient très accueillants. En ce temps là, la liberté sexuelle existait dans les îles du Pacifique, quelque peu en opposition avec celle de l'Europe. Les relations sexuelles des polynésiennes avec les marins visiteurs étaient largement tolérées et même considérées comme banales.

       Étant resté assez longtemps à TAHITI en attendant le moment propice pour empoter les arbres à pain, la BOUNTY reprit la mer le 4 avril 1789 et la mutinerie éclata trois semaines après, lorsque BLIGH, alors au niveau des îles TONGA décidait finalement de passer par le Cap Horn !



       On connaît le dénouement … Dans une chaloupe, BLIGH et ses fidèles parcoururent près de 6.000 milles en 41 jours (sous vents dominants) jusqu'à TIMOR, île Hollandaise entre l'Australie et l'Indonésie (points 16 à 17). Tandis que le BOUNTY sous les ordres de CHRISTIAN (Prénom : Fletcher) partait dans l'Est pour une fuite éperdue devant l'Amirauté britannique qui se terminera dans les îles inhabitées de PITCAIRN beaucoup plus à l'Est, vers l'île de Pâques (points 8,9,10). Pour échapper à la vue de la flotte Anglaise, la BOUNTY est brûlée le 23 janvier 1790 … Cette date reste une fête nationale pour les quelques 45 habitants actuels de PITCAIRN, qui sont cependant restés sous la couronne britannique !

       On pense que là-bas, du point de vue des relations intimes, le calme est revenu depuis longtemps et ironie de l'histoire encore, c'est un des descendants de CHRISTIAN qui était maire de la capitale ADAMSTOWN en 2004 jusqu'à sa condamnation pour viol !

       BLIGH revint donc en Angleterre et passa en cour martiale pour… avoir perdu son navire ! Il fut cependant blanchi. Les mutins furent poursuivi et certains ramenés en Angleterre pour y être jugés et ils n'échappèrent à la corde que grâce à la clémence du roi George III. Finalement l'aventure de la BOUNTY et surtout son exploit de rejoindre TIMOR avec 18 personnes sur une barcasse de 7m rendirent BLIGH célèbre.

       Il eut ensuite une carrière brillante avec quand même quelques péripéties. En 1792, il commande la HMS Providence et se voit désigner pour recommencer la même mission qu'avec la Bounty. Il réussit sa mission avec succès ce coup-ci; Mais, en fait, les esclaves des Antilles ne voudront jamais manger des fruits de l'arbre à pain !

       En 1797 alors qu'il commandait le HMS DIRECTOR, il fut à nouveau évincé de son navire lors de la mutinerie du NORE… Finalement, la flotte britannique subissait le contre-coup de la révolution française. Les mutins voulaient rallier la France comme certains mutins voulaient rallier la Corse il n'y a pas si longtemps ! Les meneurs furent pendus aux plus hautes vergues. Les Anglais n'avaient pas encore découvert la guillotine, d'ailleurs ils ne l'adopteront jamais !

       BLIGH commanda ensuite de nombreux navires toujours dans la marine Royale et participa entre autres à la bataille navale de Copenhague en 1801 sous les ordres de NELSON. Après avoir été élu membre de la Royal Society comme marin et botaniste, il se voit confier en 1805 le poste de gouverneur de Nouvelles Galles du Sud en Australie. Pendant 5 ans, il tenta de mettre de l'ordre dans un pays aussi vaste que rustre, et où la monnaie d'échange commerciale était l'alcool !

       Il termina sa vie à LONDRES comme contre-amiral puis vice-amiral toujours sous le pavillon bleu. En Grande-Bretagne c'est encore plus net que chez nous… on ne mélange pas les torchons avec les serviettes, isn't it ? Il vivait respecté à LAMBETH au bord de la Tamise, et il mourut à 64 ans du côté de Bond Street (CITY) alors qu'il rendait visite à son docteur.

       Dans le jardin de Lambeth St Mary's Church, un mausolée contient les restes de notre Capitaine en compagnie de ceux de son épouse morte 5 ans avant lui et de quelques uns de ses descendants. Rien ne rappelle la BOUNTY sur ce monument sauf l'arbre à pain qui surmonte une coupe démesurée et qui doit évoquer sa deuxième tentative de 1792, réussie celle là ! D'ailleurs l'épitaphe rappelle cet exploit.


SACRED
TO THE MEMORY OF
WILLIAM BLIGH ESQUIRE FRS
VICE ADMIRAL OF THE BLUE
THE CELEBRATED NAVIGATOR
WHO FIRST TRANSPLANTED THE BREAD FRUIT TREE
FROM OTAHETTE TO THE WEST INDIES
BRAVELY FOUGHT THE BATTLES OF HIS COUNTRY
AND DIED BELOVED RESPECTED AND LAMENTED
ON THE 7th DAY OF DECEMBER 1817


       Bligh avait su également tirer profit du retour d'expérience de James COOK. Cela se voit un peu dans les films mais il faisait manger des citrons à ses hommes et les obligeait à un exercice physique tous les jours en les faisant danser de 5h à 8h le soir sur le pont. Il assurait la fumigation des cales contre les rats, la ventilation des entreponts et emménagements équipage. Il exigeait le lavage des vêtements et leur séchage !
 

       En conclusion, notre collègue BLIGH a connu des mutineries et s'est fait évincer de son navire à plusieurs reprises. Même si ce genre d'exactions était plus fréquent à cette époque, cela nous interpelle quand même. En effet les mutins finissaient tragiquement au bout d'une corde… Aujourd'hui les enquêteurs parfois ne sont même pas capables « d'identifier formellement » les mutins. Pour notre intérêt on espère que le GIGN a formellement identifié les mutins du « Pascal Paoli » même si on ne souhaite pas du tout les voir se balancer au bout du mât radar !

Cdt B. APPERRY


Retour au menu
Retour au menu