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Conférence Seafarers' mental health. 28 avril 2023 à Cork


Organisée par l'International Marine Health Foundation (IMHF) avec la coopération du National Maritime College of Ireland (NMCI) et de la Munster Technological University (MTU) de Cork, Irlande, la conférence était menée par le Capt. Bill Kavanagh du NMCI et de l'IIMM (Irish Institute of Master Mariners), également représentant irlandais auprès du CESMA.


Après quelques mots de bienvenue du NMCI (Capt. Sinead Reen, chef du département des études maritimes et Capt. Bill Kavanagh) et de Tim Carter (Centre norvégien de médecine maritime et de plongée, Université de Bergen), le premier orateur était le Dr Nebojsa Nikolic, président du Directoire d'IMHF, dont il a fait une présentation.

L'IMHF est composée d'un groupe d'experts, ce qui permet :
  • Une approche scientifique et pédagogique
  • Un centre de ressources capable d'aider sur les questions médicales maritimes
  • D'identifier les conditions ayant un impact pertinent sur la santé des communautés allant en mer et les options de traitement médical de ces conditions
  • De transférer ces connaissances dans la formation des professionnels engagés dans la médecine maritime et de conseiller les autorités, les décideurs et les cadres responsables sur les questions médicales maritimes
  • De conseiller les étudiants, les chercheurs ainsi que les bailleurs de fonds sur la priorisation et l'exécution de projets de recherche sur la médecine maritime et ses domaines adjacents
  • De participer à l'organisation de séminaires, événements, ateliers, conférences et congrès scientifiques, donc une coopération avec des institutions et organisations nationales et internationales ayant des intérêts identiques ou similaires.
L'objectif des ateliers est de servir de guide aux décideurs. Les groupes d'ateliers sont composés de représentants de différents pays, professions et expériences souhaitant améliorer la santé des gens de mer.

Sur le plan psychosocial, les gens de mer rencontrent tous les problèmes classiques. On signale notamment des niveaux élevés d'anxiété et de dépression. Les gens de mer souffrent d'épuisement professionnel ainsi que d'autres troubles psychiatriques généraux avec un taux élevé de suicide qui est probablement sous-déclaré. Il y a beaucoup d'indications comme quoi les gens de mer, comme les employés à terre, peuvent avoir des problèmes de santé mentale.

Environmental, social and corporate governance

Par le Pr Malcolm MacLachlan, professeur de psychologie et d'inclusion sociale, Maynooth University, Irlande

Tout est lié : finance – performance – bien-être.

Les préoccupations communes sont : les heures travaillées, la durée du contrat, le lien entre les fonctions supérieures et la nationalité, les différents taux de rémunération pour le même travail, l'accès aux soins de santé pendant l'emploi et entre les contrats. Tout cela peut être considéré comme une forme de néo-colonialisme, les propriétaires de navires (des pays riches) exploitant des marins venant de pays de moindre puissance économique.

Malgré l'importance de la navigation pour le commerce international, les gouvernements ont toujours échoué à protéger les droits des gens de mer, certains marins ne relevant pas de la juridiction d'États ayant le devoir de les protéger.

Les gestionnaires maritimes pourraient prendre de nombreuses mesures pour améliorer le bien-être de leur personnel, notamment en pratiquant une surveillance accrue du potentiel de mauvaise santé mentale, en augmentant du nombre de membres d'équipages, en assurant la formation et le soutien.

Le bien-être, la performance et la sécurité sont déterminés par l'organisation et le système industriel dans son ensemble. Cependant, de nombreuses interventions portant sur la dépression et le suicide sont axées sur l'individualisme. Les initiatives telles que les brochures sur la réduction du stress s'adressent aux gens de mer eux-mêmes et ne sont que des mesures tertiaires ou secondaires. Ils ne se concentrent pas sur la réduction des principaux facteurs de stress et risques professionnels.

Le groupe de travail « Maritime just transition task force » a été formé pour garantir que la réponse de la navigation à l'urgence climatique place les gens de mer et les communautés au cœur de la solution. La formation et les compétences des gens de mer doivent soutenir une industrie du transport maritime décarbonée. Cependant le « Transport maritime juste ou Just shipping » devrait tenir compte de l'élément humain (hiérarchie, développement de carrière), de la diversité (genre, âge, nationalité, couleur), de l'impact humain sur le transport écologique, de l'interaction humaine et numérique. Ainsi, la "Transition juste pour les gens de mer ou Just transition for seafarers" est un grand pas en avant, mais doit être plus étroitement liée à la justice organisationnelle et sociale et le lien avec le bien-être et la santé mentale.

Legal aspects of supporting seafarers on abandoned ships

Par M. Jan de Boer, division des affaires juridiques et des relations extérieures de l'OMI

Outre la convention du travail maritime, MLC 2006, l'OMI a établi des groupes de travail conjoints avec l'OIT sur les questions relatives aux gens de mer. Sont déjà élaborées : des lignes directrices sur le traitement équitable des gens de mer en cas d'accident maritime, des directives sur la responsabilité et l'indemnisation concernant les demandes d'indemnisation pour lésions corporelles ou décès de gens de mer, des directives sur la fourniture d'une garantie financière en cas d'abandon des gens de mer, des lignes directrices sur la manière de traiter les cas d'abandon des gens de mer.

Définitions tirées des Lignes directrices de 2001 :
  • L'abandon se caractérise par la rupture des liens entre l'armateur et le marin
  • L'abandon se produit lorsque l'armateur ne remplit pas certaines obligations fondamentales envers le marin concernant le rapatriement en temps voulu et le paiement de la rémunération due et la fourniture des nécessités de la vie : nourriture, logement et soins médicaux adéquats
  • Il y aura abandon lorsque le capitaine du navire se trouvera sans aucun moyen financier pour l'exploitation du navire


La procédure :
  • Un État membre ou une organisation accréditée auprès de l'OIT ou de l'OMI envoie des informations à l'OIT concernant un nouveau cas
  • L'OIT envoie ces informations pour vérification à l'OMI afin de confirmer le numéro OMI, le pavillon, le type de navire, la société et le propriétaire enregistré
  • L'OMI renvoie (modifiées si nécessaire) les informations à l'OIT et à la suite de consultations entre l'OMI et l'OIT, les informations sont saisies sur un site Web restreint, c'est-à-dire non public et protégé par un mot de passe
  • Les parties intéressées sont informées par l'OMI des nouvelles entrées et elles ont la possibilité de fournir de plus amples informations dans les 10 jours ouvrables
  • Par la suite, les informations sont mises à la disposition du public sur http://www.ilo.org/dyn/seafarers/seafarersbrowse.home. Si nécessaire, différents points de vue seront exposés
  • Un cas d'abandon sera considéré comme résolu si, et seulement si, l'OIT a reçu un avis clair de l'État membre ou de l'organisation ayant initialement fourni l'information selon laquelle :
    1. la totalité de l'équipage a été rapatriée avec succès et
    2. la totalité de toutes les rémunérations et droits contractuels dus ont été payés et dûment perçus par tous les membres de l'équipage.
Les amendements de 2014 à la MLC 2006 ont été établis sous les auspices de l'OIT et sont basés sur les directives de 2001 élaborées par le groupe de travail conjoint OMI/OIT. Ils contiennent des exigences obligatoires pour les armateurs notamment d'avoir une assurance pour couvrir l'abandon des gens de mer, y compris les frais de rapatriement, ainsi que les réclamations en cas de décès ou d'invalidité de longue durée des gens de mer.

Au cours de la période 2012-2016, entre 12 et 19 incidents ont été signalés chaque année. Après l'entrée en vigueur des amendements de 2014 le 18 janvier 2017, il y a eu un pic de nouveaux cas d'abandon : 55 cas signalés en 2017, 44 cas en 2018, 40 cas en 2019, 85 cas en 2020, 95 cas en 2021 et 109 nouveaux cas en 2022, dépassant ainsi de manière alarmante le record de l'année précédente de nouveaux cas d'abandon signalés dont environ 17 cas étaient liés aux conséquences de la pandémie de Covid-19 aggravant encore la situation à l'occasion des changements d'équipage.

Les dernières mises à jour :
  • LEG 107 de novembre 2020 a convenu d'élaborer des lignes directrices à l'intention des autorités de l'État du port et de l'État du pavillon sur la manière de traiter les cas d'abandon des gens de mer
  • LEG 108 en juillet 2021 a convenu d'établir un groupe de correspondance intersessions pour faire avancer les travaux
  • Le groupe de correspondance a fait rapport au LEG 109 en mars 2022, qui a approuvé le projet de lignes directrices et a décidé de les transmettre en tant que document de base pour examen et perfectionnement à un groupe de travail tripartite conjoint OIT-OMI (JTWG) afin d'identifier et de traiter les problèmes des gens de mer et les éléments humains
  • Le JTWG était composé de huit gouvernements nommés par l'OMI (Argentine, France, Inde, Indonésie, Kenya, Îles Marshall, Philippines et Royaume-Uni), de huit représentants des armateurs et de huit représentants des gens de mer
  • En juillet 2022, le Conseil de l'OMI a approuvé la création du JTWG et les décisions du Comité juridique
  • Le JTWG s'est réuni du 13 au 21 décembre 2022 et a adopté de nouvelles lignes directrices sur la manière de traiter les cas d'abandon des gens de mer. Les lignes directrices visent à faire face à l'augmentation significative des cas signalés d'abandon d'équipages et à fournir des orientations pratiques sur la manière de résoudre les cas d'abandon.

Loss prevention

Par le capitaine John Dolan, North Standard P&I

Qu'est-ce qu'un P&I Club :
Association à but non lucratif d'armateurs partageant les mêmes idées. Créé pour la première fois au milieu du XIXe siècle. C'est un club d'assurance mutuelle. Ce n'est pas une société anonyme. Les membres armateurs contrôlent la société de gestion par l'intermédiaire d'un conseil élu. Douze clubs composent le Groupe international des assureurs P&I, assurant environ 90 % de la flotte mondiale.

Les principales fonctions du P&I Club sont les suivantes :
Protéger les membres des réclamations de tiers
Couvrir les responsabilités de tiers, par ex. maladie de l'équipage et blessures corporelles
Indemniser un membre de ses pertes.
Ce qui est possible grâce à un vaste réseau de correspondants et d'experts dans le monde ainsi qu'à une organisation basée sur des règles précises.

En ce qui concerne les membres d'équipages, les règles applicables du club sont :
Règle 3.1.1 – Blessure, maladie ou décès membres de l'équipage – Responsabilités en cas de blessure, de maladie ou de décès de membres de l'équipage.
Règle 3.1.2 – Rapatriement – Responsabilités relatives au rapatriement de membres de l'équipage.
Règle 3.1.3 – Dépenses de relève – Dépenses nécessairement encourues pour convoyer des remplaçants pour remplacer le membre d'équipage décédé, frappé d'incapacité ou débarqué à la suite d'une blessure, d'une maladie ou d'une désertion. Les salaires ne sont récupérables que lorsqu'ils sont versés aux remplaçants, en attendant et pendant le rapatriement.

Deux sortes de coûts sont générés en cas de blessure/maladie :
Coûts directs : transport – traitement – indemnisation
Coûts indirects : perte d'exploitation – recrutement – heures supplémentaires – prime d'assurance – gestion
Les coûts engendrés sont de 30 à 50 000 $, mais peuvent atteindre des montants bien supérieurs.
Il y a un intérêt évident pour la sécurité et le bien-être des équipages à bord. Les armateurs, et les assureurs ont très peu d'influence sur les coûts d'évacuation, de soins médicaux et de relève. Et la position du club est d'être solidaire par défaut.

Les défis auxquels nous sommes confrontés :

Le suicide est la première cause de décès des marins. En général, la santé mentale est affectée par l'isolement social, la longueur des voyages, la fatigue, la séparation d'avec la famille et les amis, la pression accrue sur les individus, le manque de cohésion de l'équipage, le manque de congés à terre, le harcèlement et les brimades, l'emploi précaire.

Les mauvaises performances à bord sont liées aux problèmes de santé mentale, problèmes liés à l'utilisation des réseaux sociaux/internet. De plus, la politique zéro alcool affecte l'interaction sociale à bord.

Que faire/organiser pour améliorer le bien-être des gens de mer ?
De nombreuses entreprises de terre utilisent la concurrence, le travail d'équipe et le désir naturel de gagner, en combinaison avec des incitations financières, pour promouvoir des comportements spécifiques souhaités. Il peut s'agir de : défis de perte de poids, événements de sports d'équipe (plaisir, meilleures relations à bord, environnement compétitif), défis basés sur la forme physique, programmes de sevrage tabagique. Tout cela peut facilement être déployé en mer.


Conclusion
Les gens de mer doivent être physiquement et mentalement capables de répondre aux besoins du système de sécurité. Le bien-être est donc crucial pour l'efficacité des systèmes de sécurité. Les armateurs et les gestionnaires devraient avoir une norme de base de bien-être pour leurs équipages dans l'intérêt de la sécurité.

Le Standard Club a produit une édition spéciale sur le bien-être des marins qui peut être téléchargée gratuitement sur le site web du Standard Club : www.standard-club.com

Public health management

Par Mme Rebecca Hayes Meija, Marine benefits, Lunds Universitet, Suède

L'environnement psychosocial du travail et la santé mentale des gens de mer à la suite de la pandémie de Covid-19.

Notre étude récente montre qu'il y a 1 marin dépressif pour 2 navires. Il y a une baisse des niveaux de bien-être 2 ans après le début de la pandémie. Les jeunes marins sont plus anxieux et déprimés. 28% des gens de mer souffrent d'une forme de dépression à bord. 24 % éprouvent de l'anxiété à un certain niveau.

Le but de cette étude était d'étudier comment différents facteurs parmi les gens de mer étaient associés au stress, à l'anxiété et à la dépression pendant la pandémie de Covid-19. L'hypothèse principale est que la santé mentale des gens de mer a été affectée par les stratégies d'atténuation de Covid-19 à bord, indépendamment de l'environnement psychosocial général.



L'enquête a été réalisée auprès d'environ 18 000 marins, de 154 nationalités différentes, dans 44 compagnies maritimes.
Il y avait 5 choix de réponses aux questions posées : fortement en désaccord, en désaccord, incertain, d'accord, totalement d'accord.
  • Mon employeur a été transparent et m'a fourni des informations régulières et mises à jour tout au long de la pandémie
  • Mon employeur a fait de son mieux pour effectuer les changements d'équipage en toute sécurité et en temps opportun
  • Je crois que mon employeur soutient les efforts de lobbying pour promouvoir la reconnaissance des gens de mer en tant que travailleurs clés
  • Mon employeur a fourni des soins médicaux et des services de santé adéquats chaque fois que nécessaire pendant la pandémie, à bord et à domicile
  • Mon employeur a favorisé et facilité un environnement plus positif pendant la pandémie du Covid-19 (consolidation d'équipe, lutte contre l'intimidation, réduction du stress, coaching, rencontres sociales, etc.)
  • Mon employeur a mis davantage l'accent sur la sensibilisation et la prévention des accidents.
  • Mon employeur a tenu ma famille informée et s'est soucié sincèrement de leur bien-être.
Les résultats de l'enquête montrent :
Les marins à bord étaient significativement plus stressés, anxieux et déprimés que ceux à la maison.
Pour les principales variables d'exposition, les gens de mer à domicile ont un souvenir plus positif de la manière dont la pandémie du Covid-19 a affecté les conditions de travail.
Une analyse de régression bivariée a indiqué qu'il y avait de fortes associations entre les principales variables d'exposition et les variables dépendantes, sauf que l'amélioration de l'atmosphère sociale n'était pas significativement associée au stress.
Dans l'ensemble, le fait d'avoir connu des retards dans les relèves, le manque de routines plus performantes, le manque de conscience d'une sécurité améliorée, une augmentation de la charge de travail, une atmosphère sociale plus mauvaise et une plus faible satisfaction des employés, tout cela était significativement associé au stress, à l'anxiété et à la dépression.

L'environnement de travail psychosocial est associé à des effets sur la santé mentale : stress, anxiété et dépression.
L'anxiété et la dépression ont été plus répandues à bord qu'à la maison.
À terre, les marins ont eu un souvenir plus positif de la façon dont la pandémie de Covid-19 a affecté les conditions de travail.
Les résultats indiquent que les mesures du Covid-19 prises pendant la pandémie ont été indépendantes de la santé mentale, de même que des variables d'origine socio-économique : âge, sexe, nationalité et rang.
Les politiques érodées liées aux relèves d'équipage ont eu un effet négatif important sur le bien-être mental en raison des retards.
La capacité des employeurs à communiquer efficacement, clairement et de manière transparente avec les gens de mer était associée à de meilleurs résultats en matière de santé mentale chez les gens de mer. Il en est de même lorsque les employeurs maîtrisent conscience de la sécurité et communications claires.

Conclusion :
Les résultats montrent que la gestion des crises au sein des compagnies maritimes a joué un rôle important dans l'atténuation des effets néfastes sur la santé mentale pendant la pandémie.
Une communication claire de la part des employeurs et l'accent mis sur les questions de sécurité à bord ont été des stratégies efficaces pour promouvoir un meilleur bien-être mental chez les gens de mer.
Cependant, les retards dans les relèves ont eu un impact négatif important sur les résultats en matière de santé mentale, soulignant la nécessité d'une coopération mondiale et d'accords globaux pour protéger les gens de mer en temps de crise.

Mental health on board

Par le Dr Marta Grubman-Nowak, Université de médecine de Gdansk

Selon les dernières statistiques de l'Agence européenne pour la sécurité maritime (EMSA, 2020), il y a quelque 280 000 marins actifs dans l'UE, pour quelque 1,9 million de marins dans le monde.

Les gens de mer à bord de navires de haute mer sont exposés à des facteurs nocifs liés à l'évolution des conditions climatiques, à des facteurs physiques et chimiques nocifs à bord, à un mode de travail spécifique, à un niveau élevé de charge mentale.
Le stress au travail est une expérience négative induite par des facteurs de stress sur le lieu de travail. Il s'agit d'un processus complexe, multidimensionnel et dynamique, au cours duquel les facteurs de stress perçus peuvent causer directement ou indirectement des troubles psychosomatiques et physiologiques. Ces affects peuvent être modérés par des facteurs individuels tels que le tempérament et la personnalité, ainsi que par des facteurs psychosociaux tels que les exigences professionnelles perçues, le contrôle, le soutien social, la perception de l'environnement travail.
En ce qui concerne le travail dans le milieu marin, un rôle particulièrement important est joué par le concept de stress mental et le rôle des facteurs psychosociaux comme ses sources. L'exposition à des facteurs physiques et psychosociaux nocifs se produit simultanément. Dans cette approche, nous avons à faire à au moins deux processus : le mécanisme direct des troubles somatiques et les effets psychologiques du stress.

Les facteurs liés aux conditions climatiques sont le travail à la fois dans les basses et très hautes températures, l'exposition au vent, les précipitations, et autres phénomènes atmosphériques.
Les facteurs physiques comprennent l'exposition aux vibrations, le champ électromagnétique, le niveau de bruit élevé, les températures élevées, la mauvaise ventilation. Ce sont aussi les agents chimiques présents sur les navires tels que l'amiante, les hydrocarbures aromatiques, le benzène et les gaz d'échappement des moteurs.

Les facteurs psychosociaux comprennent les longues heures de travail, le travail par quart et les quarts de nuit (en particulier les officiers pont), l'exposition au stress et aux événements traumatisants, la piraterie et les catastrophes, la longue séparation d'avec la famille, le séjour constant dans un environnement fermé, l'isolement, le manque de contrôle, la responsabilité des membres d'équipage, les situations conflictuelles, les différences culturelles (la plupart des équipages étant constitués de nationalités différentes, parlant des langues différentes, souvent issus de pays culturellement éloignés).
Ces aspects peuvent augmenter le niveau de stress, ainsi qu'induire un sentiment d'isolement et contribuer à un plus grand risque de dépression, surtout au début d'embarquement.

Les facteurs de stress présents dans cet environnement marin ont des conséquences négatives sur les aspects de santé et de bien-être au travail. Cela peut avoir pour résultat différents types de troubles somatiques, de dysfonctionnements mentaux et parfois la démission. Pour l'adaptation à des conditions extrêmement difficiles, le rôle le plus important est joué par les caractéristiques individuelles qui modifient positivement ou négativement les conséquences du stress sur la santé.

Conséquences sanitaires :

Les personnes travaillant en mer sont perçues comme en meilleure santé que les autres types de professions (du fait des niveaux d'exigences à l'embauche). Cependant le stress au travail peut entraîner des douleurs musculo-squelettiques, des troubles cardiovasculaires, des troubles gastro-intestinaux, des problèmes respiratoires, des troubles auditifs, des troubles endocriniens (diabète, thyroïde), des troubles du système nerveux et des troubles du sommeil. Les facteurs psychosociaux les plus importants affectant le système musculo-squelettique sont les exigences du travail, la liberté de décision, les symptômes de stress, le soutien social et l'anxiété psychologique.

Recommandations pour la prévention de la santé :
  1. Changements organisationnels :
    Augmenter la pression sur les armateurs pour qu'ils planifient les transports et les opérations de cargaison de manière à minimiser le nombre de quarts de nuit et à travailler au maximum 55 heures par semaine.
    Il serait avantageux d'organiser le travail de manière à ce que les quarts/corvées soient de 12 heures au lieu de 6 lorsque cela est possible.
    Former l'équipage sur les mécanismes et stratégies d'adaptation aux situations stressantes et à la communication interpersonnelle pour réduire le niveau de stress.
  2. Prévention de la santé mentale dans le processus de recrutement :
    Élaboration de protocoles de dépistage en santé mentale.
    Introduction de l'évaluation psychologique obligatoire pour le certificat de santé.
    Accroître l'accès aux connaissances sur la charge psychologique liée au travail en mer et les possibilités de demander de l'aide et du soutien en tant qu'outils de prévention de la surcharge mentale.

Mental resilience in maritime emergency situations

Par le capitaine Brian Fitzgerald, Simply Blue Group

L'orateur était capitaine sur un navire engagé dans l'opération PONTUS en Méditerranée entre 2015 et 2018. Au cours de cette opération, quelques 15 500 migrants ont été secourus. Mais tous les migrants aperçus en mer n'ont finalement pas été secourus. Il possède également une expérience des opérations SAR.
Son propos a été principalement sur la notion d'espoir. Pour les personnes secourues d'abord, elles peuvent avoir perdu des membres de leur famille ou des amis pendant l'opération. Et pour les sauveteurs aussi, quand ça ne va pas aussi bien que prévu.

La résilience mentale peut provenir de :
  • L'entraînement
  • La préparation et des exercices (Fleet operational sea training – FOST)
  • Le travail en équipe
  • Le but à atteindre
  • Les services de soutien du personnel
  • Et l'analyse des troubles de stress post-traumatique (TSPT)

Seafarer mental health – Root causes, threat lines, barriers and recovery

Par le Dr Imogen Stilz, Shell Londres

Le travail dépend de la santé mentale, de la prise de décision individuelle et collective et de l'établissement de relations. Mais cela impacte également la sécurité, y compris la sécurité psychologique, le sentiment d'appartenance et l'équilibre entre les exigences du travail, le contrôle et le soutien.

Une santé mentale altérée signifie une fonction cognitive défaillante, ce qui entraîne une capacité de travail amoindrie, et peut donc mener à un incident.
Plusieurs facteurs peuvent affecter la santé mentale des gens de mer : l'état individuel de santé mentale (bon ou mauvais), les exigences du travail, la culture du travail, l'environnement, les soucis de la vie privée, les difficultés avec les collègues ou les supérieurs, et les problèmes de santé antérieurs ou existants.

Avoir une vue des causes profondes, des menaces, de la séquence des événements, permet de mettre en place un système et des processus pour soutenir une bonne santé mentale et prévenir des effets néfastes d'une mauvaise santé mentale. Tout processus lié aux personnes doit tenir compte de la sécurité en matière de santé mentale, des capacités, des risques pour la santé, de l'intervention d'urgence et de la réadaptation, du bien-être des travailleurs, des avantages sociaux et de la discipline. L'engagement du leadership, les exemples de gestionnaires et la culture organisationnelle sont essentiels. Cependant changer la culture nécessite du temps.

Seafarer wellbeing

Par Dr Syed Asif Altaf, ITF

La culture du travail est importante ainsi que la culture de la sécurité. L'ITF est en discussion avec l'industrie maritime, principalement celui des croisières, pour améliorer le bien-être des gens de mer.
Actuellement, l'ITF est en cours de négociation sur une « indemnité de décès » en cas de suicide.

Seafarer wellbeing and the maritime system

Par le Dr Olivia Swift, Lloyd's Register Foundation

Lloyd's Register Foundation est une organisation caritative mondiale politiquement et financièrement indépendante qui vise à concevoir un monde plus sûr en promouvant la sécurité et l'éducation. Cette fondation est actuellement active dans plus de 140 pays, travaillant là où il y a le plus grand besoin pour relever les plus grands défis de sécurité et sauver des vies.

La mission de la fondation :
Assurer, au profit de la communauté des normes techniques élevées de conception, de fabrication, de construction, d'entretien, d'exploitation et de performance dans le but d'améliorer la sécurité des marins et des biens en mer, sur terre et dans les airs. Faire progresser l'éducation publique, y compris dans les industries du transport et dans toute autre discipline d'ingénierie et technologique.

Les défis :
Sécurité en mer
Sécurité des aliments
Sécurité des infrastructures physiques
Sécurité des systèmes numériques et pilotés par les données
Sécurité pour un avenir durable
Compréhension des risques et des comportements pour améliorer la sécurité
Améliorer l'accès aux compétences en ingénierie.

Une partie du travail de la fondation sur le bien-être des gens de mer peut être consultée sur le site web : https://www.lrfoundation.org.uk
Certains travaux concernent l'environnement de sécurité en abordant la santé mentale, le bien-être psychologique dans les contextes professionnels, les relèves d'équipage, les communications essentielles pour améliorer le bien-être des gens de mer.

Seafarer quality of life on board

Par le Dr Nihan Senbursa, Université d'Ordu, Turquie

Avec l'identification récente des gens de mer comme des travailleurs essentiels par l'OMI, l'industrie maritime s'est concentrée sur la recherche de moyens d'aborder et d'améliorer la santé et le bien-être psychologique des gens de mer. En raison des conditions environnementales dangereuses, des produits chimiques transportés, du stress psychologique et des risques liés au mode de vie en mer, (ce sont des facteurs qui interfèrent avec leur santé, en comparaison à la population générale), les gens de mer qui travaillent sur des navires commerciaux sont plus susceptibles de présenter des maladies, troubles mentaux et blessures car ils passent des semaines voire des mois en mer, sont éloignés de chez eux et ont accès à peu de services médicaux. L'isolement et la séparation de la famille et des amis, le sentiment de solitude, peuvent avoir des conséquences importantes sur la santé mentale et physique. Et contrairement à la plupart des autres professions, les gens de mer sont à bord pendant les heures de travail et les heures non travaillées.

Une étude a été menée auprès de marins turcs travaillant sur des navires au long cours. Quelques 955 données ont été collectées sur un questionnaire comprenant 36 items, regroupés en plusieurs dimensions composant la qualité de vie liée à la santé : fonctionnement physique, rôle-physique, douleur corporelle, état de santé général, vitalité, fonction sociale, rôle émotionnel et santé mentale. Pour chaque question, le score était de 0 à 100, la moyenne à 50.

La majorité des marins étaient âgés de 31 à 50 ans (62,2%), mariés (58,4%), diplômés universitaires (35,2%), gros et obèses (63,7%), sans antécédents médicaux (88,9%), ne consommant pas de drogue (91,1 %), fumeurs (54,7 %) et ne consommant pas d'alcool (74,2 %).

Les résultats selon l'âge montrent que les marins âgés de 20 à 30 ans ont une santé mentale inférieure à la moyenne et une santé physique supérieure à la moyenne.
  Selon le niveau d'éducation, la santé mentale est inférieure à la moyenne pour les diplômés du secondaire et la santé physique inférieure à la moyenne pour les diplômés du primaire. La santé mentale des marins mariés ou célibataires, égale pour les deux groupes, est inférieure à la moyenne générale.
Les marins obèses ont l'état de santé physique le plus bas, mais la santé mentale est considérablement meilleure que les autres.
Les gens de mer ayant des antécédents médicaux (maladies) ont une moins bonne santé mentale et physique.
La santé mentale et physique des gens de mer qui consomment régulièrement de la drogue est moins bonne.
Les gens de mer physiquement surmenés ont une moins bonne santé mentale.
Selon le type de navire, la santé mentale des marins travaillant sur des navires vrac sec est très mauvaise, et la santé physique des marins travaillant sur des navires rouliers est la pire.
Selon les postes et les fonctions occupés sur le navire, la santé mentale des élèves est jugée parmi la pire, la deuxième plus mauvaise étant celle des officiers de pont et du capitaine. Il est également déterminé que la santé physique des matelots est la pire.
Selon le temps de navigation du marin, la santé mentale de ceux qui travaillent en mer depuis moins d'un an et depuis 16-20 ans est moins bonne que les autres, aucun groupe ne dépassant la moyenne de 50.

Conclusion :

En général, l'état de santé auto évalué des gens de mer était bon, mais il diminuait considérablement avec l'âge, également selon le pays. Les officiers pont et machine affichaient des niveaux d'anxiété nettement plus élevés que l'équipage. Les résultats montrent que la responsabilité managériale est associée à des niveaux de stress plus élevés. Les facteurs affectant l'état de santé général ont été déterminés comme venant du type de navire et de la charge de travail corporelle. Les marins travaillant sur les vraquiers et les navires citernes ont un état de santé général moins bon que ceux travaillant à bord de porte-conteneurs.
L'industrie du transport maritime peut jouer un rôle essentiel dans la lutte contre la solitude en mer en fournissant les ressources et le soutien nécessaires aux marins à bord. Un tel soutien peut inclure la mise à disposition de moyens de communication qui permettent aux gens de mer de rester en contact avec leurs proches, des services de soutien qui peuvent leur fournir les ressources et les mécanismes d'adaptation nécessaires, et des activités de groupe qui favorisent un sentiment de communauté et d'appartenance.
Il convient de s'assurer que les étudiants ont une bonne compréhension de la profession qu'ils exerceront à l'avenir avant de commencer leur formation maritime.
L'utilisation de montres intelligentes qui peuvent fournir des avertissements lorsque les niveaux de stress sont anormaux, en combinaison avec l'implication d'un psychologue, peut réduire l'apparition de comportements extrêmes à bord. Cela peut s'avérer extrêmement utile pour les voyages extra-longs ou pendant les quarantaines où la pression émotionnelle peut être augmentée. De plus cela peut également fournir une solution pour minimiser l'apparition de troubles mentaux graves comme la dépression et l'anxiété.

Seafarer resilience

Par le Dr Karen Weekes, MTU

Le Dr Weekes a été la première Irlandaise à traverser seule l'océan Atlantique à la rame. Elle partage son expérience de résilience lorsque les choses n'allaient pas aussi bien qu'elle le souhaitait.

Pour ne pas perdre espoir, avoir des idées positives ou regarder une photo d'êtres chers ou de campagne peut restaurer la confiance en soi et aider à la résilience.

Cependant, cette femme est une athlète, entraînée physiquement et mentalement pour cet objectif. Et, plus important encore, elle était tout le temps capable de se connecter à terre pour des appels, des vidéos ou des messages. Si bien sûr la traversée n'était pas drôle tous les jours, il y avait au départ une volonté d'accomplir cette traversée.

Remarque personnelle : malheureusement, je ne suis pas sûr que son expérience de la résilience puisse aider les gens de mer standards qui subissent un incident grave comme un incendie ou une piraterie dans l'exercice de leur métier. La question pour ces marins, comment rejoindre à nouveau un navire ?, est restée clairement sans réponse.

Workplace bullying and harassment at sea

Par Dr Cecilia Osterman, Université Linnaeus, Suède

Le Dr Osterman a une expérience de douze ans en mer dans la marine marchande. Elle a commencé son propos par sa propre expérience malheureuse sur un navire.

L'intimidation au travail se retrouve généralement dans le cadre d'activités, de processus par des comportements répétés et réguliers, souvent sur de longues périodes, par exemple en harcelant, offensant ou excluant socialement une personne.

C'est souvent un déséquilibre de pouvoir reflétant les structures de pouvoir formelles ou informelles.

Le harcèlement fait généralement référence à des actes de discrimination fondés sur une catégorie ou des caractéristiques, cela variant d'un pays à l'autre. Il peut être physique et/ou psychologique.

Le comportement non civilisé est lié au harcèlement sexuel, à l'intimidation, à la violence au travail, au mobbing (le mobbing est un harcèlement psychologique se produisant en meute et à l'encontre d'une seule personne) et à la victimisation.

L'intimidation et le harcèlement sont des problèmes importants dans l'industrie maritime. Et, le plus souvent, le supérieur est l'agresseur. Les symptômes sont individuels, mais les facteurs sont organisationnels : incertitude (qui fait quoi, quand et comment), charge de travail élevée (physique, temporelle, cognitive et émotionnelle), conflit (mode de travail, pouvoir, cloisonnement, relations), leadership faible (peu ou pas de latitude de décision), culture du lieu de travail (rôles, jargon et manque de diversité), travailleurs précaires embauchés en CDD.
 

Ce que l'on sait a l'apparence d'un iceberg : le décès en est la partie apparente, mais en dessous, ce sont les blessures graves, les viols, les violences, les sévices, puis les blessures légères, les menaces, l'exploitation psychologique ou physique, les attouchements et les quasi-violences, les comportements à risque, les « blagues » sexistes, racistes ou homophobes, et langages problématiques.

Comment répondre
Pour les marins

Formation de connaissances de base en matière de SST
Formation de spectateur - apprendre à reconnaître et à réagir à une situation désagréable
Créer un environnement impliquant la certitude que vos collègues vous soutiendront
Apprendre à remarquer et à agir en cas de changement de comportement ou d'interaction dans le groupe ;
Avoir des moyens indépendants et fiables permettant, depuis la mer, de communiquer avec la terre sans intervention d'autres membres du personnel.

Pour les managers (à bord et à terre) :

Ce sont des modèles importants, donc disposer de ressources adéquates, d'outils et de temps pour un travail proactif visant à réduire les facteurs qui constituent le foyer d'intimidation et de harcèlement au travail.
La rotation continue et le leadership partagé créent des défis.

Pour les organisations :

Mettre en place des conditions de travail équitables
Améliorer l'environnement de travail physique et psychosocial à bord
Les procédures et politiques visant à protéger la dignité et l'intégrité des gens de mer doivent être rigoureusement appliquées par la direction, et également être obligatoires pour l'intégration du personnel
Mettre en place des procédures de signalement claires et confidentielles
Professionnaliser les équipages des services hôteliers des navires de croisière

Pour l'industrie maritime :

Donner aux gens de mer des conditions de travail décentes.
Conformément aux processus du système de gestion de la sécurité, les risques qui constituent un foyer d'intimidation et de harcèlement au travail doivent être activement identifiés, évalués et gérés
Les inspecteurs et les auditeurs doivent poser de nouveaux types de questions pour mieux comprendre les conditions de travail à bord
Identifier les facteurs de sécurité du travail, pas seulement de la sécurité
Les actions, et leurs impacts, doivent être évalués pour s'assurer de l'effet escompté
Il ne faut pas nécessairement plus de législation, mais plutôt une surveillance et une application plus strictes de la conformité aux réglementations existantes.

Modèles, représentation et inspiration

Ne pas sous-estimer pas les effets des modèles ;
Mettre en valeur la diversité ;
Quelle représentation à tous les niveaux : conseil d'administration, gestionnaires, employés ;
Ne pas attribuer de tâches en fonction de stéréotypes de genre ;
Dire non à tous les stéréotypes masculins.
L'engagement de la direction est crucial. Lorsque l'entière responsabilité est placée sur les cadres intermédiaires, elle sera facilement dévalorisée dans le travail quotidien.

Conclusion

Pour terminer cette journée, il y a eu une session (1h30) de discussion avec propositions de recommandations pour élaborer un texte à présenter à l'OMI et l'OIT, recommandations portant principalement sur la formation des équipages ainsi que des managers. En attente désormais de finalisation, de présentation, et pourquoi pas de validation. Affaire à suivre donc.
Cdt Hubert Ardillon
Vice-président de l'AFCAN



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